Conseil Agricole et Rural

Le Conseil agricole et rural 
(extrait du mémoire de Master Acteurs du développement rural de Boubacar BA)

De la vulgarisation au Conseil agricole et rural  

La vulgarisation agricole  peut être considérée comme « un système par lequel on transmet à des populations rurales un ensemble de connaissances et de moyens techniques dans le but de permettre une augmentation de la production ». Elle est  souvent limitée à un simple transfert de technologies agricoles et s’est souvent soldée par un impact limité en termes d’adoption et d’échanges  entre les ruraux. Un nouveau mécanisme devant être plus accessible a alors été identifié (ANCAR 1.b, 2007).
Aussi la FAO, après diagnostic de tous les systèmes de vulgarisation mis en œuvre  a fortement contribué à la formulation et la mise en place en 1990 du Programme National de Vulgarisation Agricole (PNVA) financé par la Banque Mondiale (BM) et basé sur  la méthode « Formation et Visite » (F&V) ou « Training and Visit » (T&V) en anglais.

Le PNVA  a permis la réalisation de quelques acquis de taille.  Néanmoins, des insuffisances ont été notées aussi bien dans son approche que dans sa mise en œuvre avec notamment :

-          L’absence d’une cohérence d’ensemble suite à la signature de protocoles d’accord avec des prestataires qui utilisaient d’autres approches outres que la F&V ;

-          La non implication de la Recherche Agricole dans l’exécution du programme qui a fortement limité l’utilisation de la Recherche-Développement et entraîné son dysfonctionnement;

-          Le déficit de communication limitant ainsi le système de suivi évaluation du programme ;

-          Les difficultés d’adoption des innovations techniques ;

-          La limitation  des activités à l’agriculture et à l’élevage.

 
Face à ces résultats très contrastés une nouvelle approche est amorcée à la fin des années  1990 pour initier un accompagnement des acteurs du monde rural leur permettant d’adapter leurs modes de production aux évolutions du contexte socio-économique et environnemental et ainsi préserver et améliorer leurs revenus.
Quatre principes d’intervention ont été définis  dans cette perspective :
  1. Rompre avec un système d’encadrement du monde rural dans lequel les institutions et les services publics appliquent des politiques productivistes via une approche descendante visant à atteindre des objectifs de production décidés par l’Etat ;
  2. Reconnaître les producteurs comme principaux acteurs de la transformation de leurs systèmes de production, de l’amélioration de leurs terroirs, de la gestion de leurs organisations et de leurs ressources naturelles : en d’autres termes les identifier comme les commanditaires du Conseil Agricole et Rural ;
  3. Reconnaître les savoirs et savoir-faire des producteurs et les aider à les améliorer plutôt que de leur dicter des comportements techniques et socio-économiques ;
  4. Appuyer et accompagner la prise de responsabilité des producteurs.
Il ne faut pas chercher à opposer la vulgarisation et le conseil agricole, la  vulgarisation n’est pas le contraire du conseil agricole  

La vulgarisation n’est pas le contraire du conseil agricole. Le conseil est plus global et comprend en son sein des activités de vulgarisation. De ce fait, la vulgarisation est une fonction du conseil  et fait partie intégrante du Conseil.  L’approche de vulgarisation est descendante ou Top Down alors que le conseil est une approche ascendante qui part des préoccupations des producteurs et de leurs organisations. La démarche de conseil est participative alors que celle de la vulgarisation a été très directive. (Analyse personnelle)

Approche du Conseil agricole et rural 
L’approche du Conseil Agricole et Rural vise à mettre en œuvre un processus continu de génération et d’appropriation de technologies améliorées par les producteurs, d’innovations dans l’organisation de la production et des services situés en amont et en aval de celle-ci. Ce processus intègre les savoirs et savoir-faire de l’ensemble des partenaires et tient compte des conditions agro-écologiques et socio-économiques dans lesquelles opèrent les producteurs ruraux.

Cette approche est globale, participative, communicative et pluridisciplinaire. Elle est basée sur un véritable partenariat avec les producteurs et les acteurs du développement rural. Elle couvre les productions végétales, animales, forestières, l’environnement et toutes les activités rurales, annexes et connexes, situées en amont et en aval des productions : l’approvisionnement, le crédit, la commercialisation, la transformation, l’artisanat, la formation, etc. Elle prend en compte l'environnement physique au sein des exploitations et des terroirs villageois ou des écosystèmes communautaires. Elle est dynamique dans le temps et différencié dans l’espace.

Du Conseil de gestion au Conseil à l’exploitation familiale
Le Conseil de gestion (CdG) est une méthode qui prend en compte l’ensemble  de la situation de l’exploitation et cherche, en dialogue avec le paysan, un chemin d’amélioration qui s’étend souvent sur plusieurs années (Paul Kleene)

Le passage du Conseil de Gestion au Conseil à l’Exploitation Familiale: cas du Bénin

 Les initiatives béninoises se sont inspirées au départ des expériences des centres de gestion français dans les années 70. Le conseil apporté était nommé  Conseil de gestion (CdG) et a été développé dans le contexte d’aider les exploitants le souhaitant à gérer leur exploitation comme de petites entreprises ayant des productions ouvertes sur des marchés porteurs (ananas au Sud et coton au Nord du Bénin).

 Mais rapidement le constat a été fait que cette approche était trop restrictive et ne prenait pas tous les aspects dans un contexte africain où les exploitations sont à 80% des exploitations familiales de polyculture élevage avec des activités non agricoles. Il fallait alors prendre en compte la globalité de l’exploitation familiale.  Le Conseil de Gestion est devenu " Conseil à l’Exploitation Familiale agricole (CEF)" (MAEP Bénin, 2007).

 Pour éviter la  confusion entre les deux concepts (CdG et CEF), le concept de Conseil de gestion aux OP a été utilisé dans les dispositifs d’appui aux OP et  l’accent  est mis sur les aspects financiers et comptables. Quant au CEF, il prend en compte la globalité de l’exploitation en partant des besoins de la famille, les traduit en systèmes de production et en systèmes d’activités pour prendre en compte les activités non agricoles.

Le Conseil à l’Exploitation Familiale (CEF) est un processus d’aide à la décision et d’apprentissage s’appuyant sur des phases de formation, d’analyse, de planification, de suivi des réalisations, d’évaluation des résultats. Il prend en compte les aspects techniques, économiques, sociaux et environnementaux de leurs activités  (P. Dugué, G. Faure, 2003).
Le Conseil de Gestion aux OP est une démarche de conseil formulée aux Organisations Professionnelles Agricoles visant la maîtrise de leur gestion comptable et financière (PAP-OPC, 2006).

Les Principes du CEF (Atelier de Bohicon, 2001) sont fondés sur :
-          Une démarche globale qui permet de gérer des aspects techniques, économiques, sociaux, etc.  
-          un processus de renforcement de capacités pour atteindre ses objectifs ;
-          une méthode d’apprentissage et d’aide à la décision qui valorise l’écrit ;
-          Expériences s’insérant dans les réalités paysannes.
-          Participation des OP dans la construction des dispositifs

Méthode de conseil

La méthode de Conseil est un ensemble d’éléments aidant le conseiller et le producteur à résoudre un problème et identifier des solutions.-
-          portant sur le problème et les solutions ;
-          portant sur la relation de conseil.
La Méthode s’appuie sur des outils et des dispositifs institutionnels.
Types de conseil
Il existe plusieurs types de conseil (P. Dugué, G. Faure, 2003). Les principaux sont caractérisés dans le tableau  N°1: présentation résumée des principaux types de conseil agricole


    Types de conseil
                    Quelques caractéristiques
1. Vulgarisation « classique »
       -       Diffusion de thèmes surtout techniques ;
       -       Conseillers détenteurs du savoir : les producteurs sont des récepteurs des messages ;     
       -       Importance des démonstrations sur le terrain mais groupes rarement constitués par affinité ;  
       -       Paysans ne gérant pas les dispositifs et ne choisissant pas les conseillers ;
       -      Savoirs paysans peu valorisés ;
       -       Liens forts avec les recherches agronomiques publiques et/ou privées qui mettent au point les thèmes.
 
2. Groupes d’auto-développement
-          Thèmes variés (techniques, économiques, agriculture durable) ;
-          .Promotion de formes d’agriculture paysanne ou d’agriculture 
 d’entreprise ;
 
-           Producteurs adhérant volontairement au conseil, gérant eux-mêmes les dispositifs et rémunérant en partie les conseillers qu’ils choisissent eux-mêmes ;
-          Pédagogie très active utilisée dans les groupes, le conseiller étant surtout un « facilitateur » ;
-           Importance des visites et échanges entre producteurs et productrices : pratiques et savoirs des paysans très valorisés ;
-          Liens pouvant être forts avec les recherches publiques ou privées ;
-          Paysans expérimentant sur les thèmes qui les préoccupent.
 
3. Conseil de gestion axé sur la formation et les conseils
technico-économiques
aux exploitations familiales
-           Approche globale de l’exploitation ;
-           Promotion de l’agriculture familiale
-           Thèmes technico-économiques comme gestion des productions vivrières, du travail et de la trésorerie au sein des familles, gestion de terroir et fertilité des sols, etc.
-          Gestion prévisionnelle plus ou moins abordée selon les expériences ;
-           Pratiques et savoirs paysans généralement pris en compte ;
-          Adhésion volontaire des paysans ;
-          Utilisation de méthodes de pédagogie active avec des échanges entre paysans ;
-           Peu d’expériences de gestion paysanne de cette forme de conseil ;
-          Liens souvent forts avec la recherche agronomique publique ;
-          Assez peu d’expérimentations paysannes.
 
4. Conseil de gestion axé sur
les aspects comptables et
économiques de l’exploitation
-          Approche comptabilité-gestion de l’exploitation familiale.
-           Influence du modèle classique de gestion d’entreprise.
-          Faible prise en compte des aspects techniques et agriculture durable (priorité à la rentabilité économique à court terme).
-          Outils parfois communs avec la méthode précédente mais, au final, dominante gestion économique (avec réalisation de bilans et comptes de résultat par des conseillers qui restituent
               individuellement les résultats aux adhérents) ;
-           Importance plus réduite des travaux en groupe que dans les cas précédents ;
-          Coût souvent plus élevé du conseil que dans les cas précédents (mais gains pouvant être très élevés pour les adhérents)
-           Adhésion volontaire des producteurs qui sont souvent lettrés et ont plus de ressources économiques que la moyenne des paysans de leur zone.
-           Liens souvent réduits avec la recherche agronomique.

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